Le conteur Jaeger Il conte et raconte sans compter une vie par lui bien remplie
34120 CASTELNAU DE GUERS FRANCE

La famille Gartz

24 Mars 2021   1er tiers

  • Lors des vacances de Noël en 1961, Maman me montre une lettre qu'elle vient de recevoir. Je ne peux la lire car écrite en allemand et qui plus est en caractères gothiques. Maman me révèle que c'est ma tante. - Ma tante ?!- Oui ta tante.  Tante Marianne, la sœur de ton père.
    Ma famille paternelle dont j'ignore tout à cette époque là à réussi, à force de ténacité, à retrouver la trace de Maman. Elle nous signale qu'Ulrike, la cousine avec qui j'ai été élevé en Allemagne, est à Paris pour y apprendre le français.

    C'est une révélation. Je suis bouleversé. Je m'appelais Jaeger. Qui était mon père ?  Il semble que je n'avais pas le droit de le savoir. J'avais compris que chaque fois que je cherchais à parler de mon père génétique, c'était synonyme de crispations, de larmes et finalement Maman éludait. Au final il valait mieux ne pas savoir.

    Et voilà que j'ai l'occasion de connaître la vérité. Ma cousine Ulrike est en France pas loin. Ulrike m'écrit pour que nous nous rencontrions. Elle est jeune fille au pair chez un officier du "Shape". Je vais la voir à St. Germain. Nous passons la journée ensemble et nous convenons que j’irai passer les vacances de Pâques à Bonn chez ses parents. Comme je ne suis pas très riche en fringue, je fais le tour des copains pour trouver un manteau. C’est Jacques Dodin qui me trouve une superbe cape manteau réversible. Elle appartient à Dick Rivers le chanteur des « Chats Sauvages ».
    Nous partons avec un car qui ramène toutes ces jeunes filles dans la mère patrie. Je suis le seul garçon. Nous passons par la Belgique et entrons en Allemagne à Aachen.
    -Tu connais ?- me demande Ulrike
    -«  Non. » 
    -« Mais oui Robert c'est la ville où a été couronné Charlemagne. »
    -« Aix la Chapelle ? »
    -« C'est la même chose. !! »

    A Bonn je découvre ou redécouvre (j'avais 4 ans et quelques mois quand sous la conduite de gendarmes français qui rentraient en France je suis arrivé sur Paris)  je découvre donc tante Marianne la sœur de mon père « génétique » et oncle Karlheinz son mari, Doris la petite sœur d'Ulrike. Mais aussi oncle Fritz le frère aîné de mon père et son épouse, tante Hilde. Tante Marianne et oncle Karlheinz sont heureux de retrouver leur neveu. Cela se voit, cela se sent. Les photos défilent ainsi que leurs souvenirs. Willi Gartz n'est plus un point d'interrogation. Ulrike fait la traduction sans relâche. Personne d’autre qu’elle ne parle le français.  Oncle Karlheinz me demande quels sont mes compositeurs favoris de grande musique. Je lui énumère, « Mozart, Tchaïkovski, Beethoven, Haendel, Bach ». - « Bach ? Who ist Bach ? » - « Bach Jean-Sébastien » - « Ach so, Bach » (en allemand Barr). Je prononçais à la française Bak ! 
    Tante, Rési voudrait bien m'avoir pour elle quelques jours. Tante Marianne refuse. J'ai juste le temps de l'embrasser. Pourquoi ce refus ? Je ne le saurai jamais avec certitude. Tous les protagonistes sont maintenant décédés.

    Je rentre en France avec quelques rudiments d'allemand. Je les perds plus vite que je les ai appris. La famille Paffen viendra ensuite en France et à Montgrand quelques jours. Je retournerai une autre fois avant la fin de ma scolarité. Toujours aussi merveilleusement accueilli. Et puis nous nous reverrons  en Allemagne avec ma Puce.
    Je sais maintenant qui est mon père. Tous les albums qu'il a lui même faits et qui me montre bébé entre lui et Maman, me troublent évidemment. Je mets enfin un nom sur un point d'interrogation et un visage sur un nom.

    Mon père et mon nom. !!

    Je sais maintenant un peu plus de choses sur lui sur les circonstances de sa mort.
    Il me reste une chose à accomplir, je veux aller voir sa tombe. Il serait inhumé dans un cimetière militaire à Düsseldorf.

    Écrit à Castelnau de Guers le 2 Avril 2020

    Robert Arnold JAEGER-GARTZ

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