Le conteur Jaeger Il conte et raconte sans compter une vie par lui bien remplie
34120 CASTELNAU DE GUERS FRANCE

Salsigne

20 Mars 2020   1er tiers

  • Quand nous arrivons dans le midi je finis l'année scolaire 51-52 à l'école communale du village. Trois écoles dans la même année. Qui dit mieux ?


    Je vais avoir 9 ans. Salsigne 1952 ce n'est pas le plus beau village méditerranéen qui soit, mais pour moi ce sera très vite une vraie terre d'accueil.
    Moins de 1000 habitants, il est célèbre pour sa mine d'or. La plus importante d'Europe paraît-il. Salsigne est un village cosmopolite où se côtoient les origines les plus diverses. Des méditerranéens bien sur, des Espagnols, des Italiens, des Polonais, des Yougoslaves des Berbères, des Arabes. (Aujourd'hui avec la fermeture de la mine d'or il n'en compte plus que 380)

    Le vieux village se serre entre son école communale et son église. A cette époque le village ne compte pas moins de 4 épiceries, 1 mercerie, 1 coiffeur, 1 cordonnier, 2 boucheries, 2 boulangers, 1 laitier, 1 charcutier. 2 forgerons, 2 bistrots dont l'un possède une salle de cinéma pour une séance hebdomadaire.

    Très vite je connais tout le monde et tout le monde me connaît.
    Je tiens de ma grand-mère le goût d'écouter raconter des histoires. Rien de tel que la fréquentation du maréchal-ferrant pour écouter les anciens s'exprimer. Et j'apprends là les bases du patois Languedocien.
    Je m'identifie à une culture, à des traditions. C'est pour moi une sorte de marcottage réussi.

    Plus tard les Salsignols m'y reconnaîtront quelque soit l'âge auquel je reviendrais et la durée entre deux visites. Mes nouveaux camarades sont Ignace, François et Jean-Marie Campayo, fils d'immigré espagnol, mais aussi Michel Gaman, André Vidal, Philippe Bezombe.

    L’année scolaire suivante 1952-1953 je suis inscrit en 8ème au petit lycée de Carcassonne.
    C'est ma huitième école. Pour m'y rendre je prends tous les jours l'autobus Salsigne-Carcassonne aller et retour en passant par Conques.
    Le lycée pour moi c'est encore la difficulté à m'intégrer. J'ai un nom bizarre, pas d'ici, mais surtout j'ai l'accent parisien. "Parisien tête de chien, Parigot tête de veau".

    Le premier qui commence à me tarabuster avec ça, a droit à un coup de poing sans sommation. C’est un noir, qui s'appelle "Pupier".........comme le chocolat. Résultat je me fais respecter, c'est certain. Mais j'enfonce en même temps que son nez, le clou d'une réputation qui aura par la suite du mal à me quitter.........Je suis bagarreur.

    Une de mes premières dictées sur le thème du sabotier me vaut la certitude d'avoir été victime d'une injustice. L'instituteur appelé alors Maître, prononce avec l'accent du midi « cueillé » au lieu de cuillère. Résultat je fais une faute......alors que j'ai droit normalement à zéro faute. J'ai un véritable sentiment d'injustice.
    Je ne suis pas mauvais en classe loin de là mais je suis assez étourdi ou rêveur comme on veut. L'interprétation dépendra de celui qui me juge ainsi. Pour mes parents j'étais incurablement étourdi, pour Mémère j'étais rêveur. Ce fut et c'est, peut être encore, un de mes grands défauts mais peut être aussi une qualité . Rêver !
    Je flâne entre le car et l'école mais surtout le soir entre l'école et le car. Ce qui me vaut souvent des réflexions agacées mais plus souvent amusées, des passagers de Salsigne qui veulent rentrer à l'heure ainsi que les remontrances amicales du chauffeur M. Averous. Pour lui, j'étais un rêveur.
    A midi comme je suis demi-pensionnaire je traverse avec mes « coreligionnaires », la rue sous un tunnel, qui me conduit au grand lycée où sont installés les réfectoires. J'y suis nommé chef de table. Ce fut sans doute ma première responsabilité dans une collectivité et à ce titre je procède à la distribution des repas.
    Après celui-ci nous avons le droit de nous distraire dans la cour du grand lycée. Un jour, ayant fait un circuit pur jouer aux billes dans le sable du sautoir, je suis perturbé par un "grand" de 6ème. Le bougre s'évertue à écraser tout mon circuit sur son passage. Une fois, deux fois mais pas trois. S'ensuit une bagarre, encouragée par l'ensemble des lycéens et qui se termine chez le surveillant général.

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