Le conteur Jaeger Il conte et raconte sans compter une vie par lui bien remplie
34120 CASTELNAU DE GUERS FRANCE

Vacances Italiennes

24 Mars 2021   1er tiers

  • Nous avons, Eric et moi vingt ans et le service militaire nous attend. Je fais les trois jours au bureau de recrutement à Auch préfecture du Gers. J'y vais avec l'idée de ne pas me faire réformer. J'ai l'impression que cela ne serait pas compris à la maison mais moins encore par moi sans doute.
    Souvenir d'une salle bondée où un gradé  demande si il y a des volontaires pour un régiment de parachutistes.  Je suis le seul à lever la main......Les autres me prennent pour un fada...

    Ensuite ce sont les tests qui permettent de déterminer le Q.I. Je les passe sans problème alors que j'en vois qui sont perdus dès la première page. Plus tard ce sera la visite médicale où le médecin me faisant passer des cartons, camaïeux de verts, constate que j'ai un défaut de vision.
    Je ne distingue pas bien les verts foncés, les bleus foncés d'avec le noir. Ce défaut m'empêche selon le docteur de sauter en parachute...Je m'insurge :  « Mon Capitaine je suis déjà breveté parachutiste en pré-militaire ! ». Dans un premier temps il s’étonne que je connaisse les grades.  Je lui explique très vite mes années d’enfant de troupe. « Si vous le souhaitez tant, alors d'accord ».
    Je reviens donc en ayant la certitude que je serai affecté dans un régiment para. Je ferai du sport, du sport et encore du sport et donc je souhaite le soir ne plus avoir la force de réfléchir aux possibles injustices.

    Mais en attendant nous décidons Eric et moi de partir en vacances .......en Italie.
    Nous avons économisé quelque argent et nous voilà partis. C'est Septembre. Pour la plupart les vacances sont finies, les plages sont désertes. Nous passons par Palavas, puis traversons la Camargue où nous rencontrons nos premières hordes de moustiques. La Côte d'Azur, les rochers de Théoule qui plongent directement dans la mer. Là, Eric se plante un oursin dans le pied. Il passera des heures à se retirer stoïquement, sans fureur et sans cri toutes les aiguilles d'oursin, assis une position qu'il affectionne, la position du Bouddha.
    Nous passons la frontière pour nous arrêter dans un camping de la Spézia petite station balnéaire près d'un des plus beaux ports du monde, Portofino. Je suis chargé de la cuisine! Le mot cuisine est peut-être un peu prétentieux. Pour midi j'achète un steak haché d'importance que je fais cuire sur notre réchaud à gaz. Nous allons acheter notre pain de campagne que l'on nous enveloppe toujours dans du papier marron d'emballage.
    Le soir il s'agit de se caler l'estomac et je «cuisine» une maïzena bien épaisse. Une fois ou deux nous comptons nos sous et nous nous payons le restaurant. Le serveur vient nous expliquer comment on mange les spaghettis....

    Dans la journée nous ne manquons pas de nous offrir une glace "gelati motta" bien sûr à la terrasse d'un café.
    Une nuit, nous sommes en train de dormir du sommeil du juste quand, patatras la «tente de mon oncle» (prêtée pour l'occasion) me tombe dessus. Je me réveille bien sûr, cherche Eric mais il n'est pas à coté de moi. Je l'appelle plusieurs fois, m'extraie de mon sac de couchage puis de la toile et trouve Eric dormant dans son «sac à viande»!! J'ai même du mal à le réveiller. Mais plus étonnant encore, nous dormions côte à côte, la tête vers le fond de la tente. Là il dort après avoir arraché toutes les ficelles de fermeture de la toile la tête à l'opposé de la tente. Autrement dit il a fait un 180° sans sortir de son sac de couchage et sans se réveiller. Chapeau bas «Baby »
    Nous n'allons pas aussi loin que nous l'aurions souhaité car alors que nous crevons deux fois de suite, nous laissons notre vespa dans l'allée d'une villa cossue. A notre retour l'argent et le poste radio d'Eric ont disparu. Il ne nous reste plus qu'une solution, rentrer en France sans  trop dépenser. C'est ce que nous ferons en reprenant la route vers la mère patrie.

    Nous suivons un camion que nous ne pouvons doubler sur une route tortueuse. Il freine s'arrête. Eric s’énerve après lui. Le chauffeur descend et nous demande pourquoi nous râlons. Il vient de s'arrêter dans la cour de son entreprise.

    Quant à nous nous continuons par des plages désertées et où nous jouons les Robinson. Nous survivons en attrapant des crabes.
    Finalement en roulant trop près de l'eau Eric noie le moteur qui ne voudra plus jamais démarrer et nous finissons le voyage dans le petit train de Palavas - Montpellier puis Marguerite Sarrail vient nous récupérer pour nous ramener à Carcassonne.

    Ici s’achève, pour moi, mon enfance et mon adolescence. A partir de maintenant je vais subvenir à mes besoins. J'ai vingt ans.
    Il est temps, non ?
    Les ordres que je vais recevoir, je vais les accepter ou pas, mais ils seront librement consentis car j'aurai choisi les donneurs d'ordres. Y compris dans l'immédiat avec le service militaire. Si je l'avais voulu, j'eusse été exempté.

    Aujourd'hui encore quand j'entends certain vouloir revenir à l'enfance, ce n'est jamais mon cas.

    Sauf ma période Parisienne mais........

    Écrit à Carcassonne le 13 Octobre 2019

    Robert Arnold JAEGER-GARTZ

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